Constantine, la spectaculaire ville des ponts suspendus

Constantine doit son surnom à une singularité géographique : bâtie sur un rocher isolé, la cité ne pouvait respirer qu’en franchissant le vide. Construits au fil des siècles par les civilisations qui se sont succédé, plusieurs ponts suspendus y défient toujours la gravité.

Un des 8 ponts de la ville de Constantine (Crédit photo : Direction l'Algérie, la série documentaire / Ayadi Productions)

"Construite sur un rocher inaccessible", Constantine est surnommée la ville des ponts suspendus, en référence aux 8 édifices construits par les différentes civilisations qui l’ont occupée. Pour défier la nature et tenter de relier entre elles les deux rives de la cité séparées par l'énorme masse de pierre, ces ouvrages spectaculaires se sont révélés indispensables au fil des siècles.

Dans l'épisode 4 de Direction l’Algérie, Hocine Taoutaou évoque certaines de ces constructions historiques qui ont donné à la ville son cachet unique.

Le Rhummel

Constantine est construite sur un rocher massif entaillé par les gorges spectaculaires d’un cours d’eau en contrebas, l’oued Rhummel. Ce torrent profond sépare la ville de ses extensions. Les premiers occupants ont donc dû inventer des manières de franchir ce gouffre pour relier quartiers et marchés. C’est le cas des Romains qui y bâtissent un premier pont en pierre à l’emplacement d’El Kantara. Le pont El Kantara s'écroule au 13e siècle pendant le règne ottoman et est alors remplacé par un nouvel édifice.

C'est sur ce nouveau pont bâtit par les Turcs que l'armée française essuie ses premiers échecs dans sa tentative d'annexion de la commune en 1836. "L'armée française a mal calculé son coup. Elle croyait la ville vulnérable de ce côté-là", raconte M. Taoutaou. "Elle revient une année après en changeant de stratégie" et la ville tombe à son tour, 7 ans après Alger. Mais "les vestiges de l'époque ottomane de ce pont sont rares", souligne le chercheur au centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques que nous avons interrogé durant notre tournage. En 1857 en effet, le pont ottoman va s'écrouler au passage d'un détachement militaire français. À partir de 1860, l'administration française en érige un nouveau, avant d’en bâtir d’autres plus imposants.

L’emblème de Constantine

Au 19e siècle, sous administration coloniale française, la ville s’équipe d’infrastructures plus ambitieuses. Le plus célèbre pont de Constantine, Sidi M'Cid, a été inauguré à cette période, en 1912 plus exactement. Sa construction a été décidée après l'ouverture de l'hôpital de la ville et relie donc la médina au centre hospitalo-universitaire.

Érigé à plus de 175 mètres au-dessus de la rivière du Rhummel, ce pont routier et piéton est long de près de 165 mètres, large de plus de 5 mètres. Il est doté d'un tablier métallique retenu par 12 câbles d’acier ancrés dans la roche et peut supporter une charge de 17 tonnes.

Pendant longtemps, il détient le record mondial de hauteur. Chef-d’œuvre d’ingénierie métallique, il offre une vue exceptionnelle sur une partie de la ville. Il est pour cette raison devenu l'emblème de Constantine.

Les autres ponts

Inauguré le même jour que le pont Sidi Mcid, le pont Sidi Rached privilégie la monumentalité en pierre avec ses 27 arches de maçonnerie qui en font le plus haut pont en pierres au monde à son époque. D’une longueur totale de 447 mètres, il permet de relier le centre-ville et la médina au quartier de la gare, ainsi qu'à la route des Aurès.

D’autres ponts attirent les visiteurs à Constantine. C’est le cas du pont du diable, exclusivement piéton. Édifié pendant la régence ottomane, il doit son nom au bruit à cet endroit, jugé démoniaque, du Rhummel qui coule à ses pieds. Haut de 65 mètres, il est le point de départ des touristes pour une traversée des gorges jusqu’à un autre ouvrage : le pont des chutes.

Plus loin, la passerelle Mellah-Slimane, anciennement appelée passerelle Perrégaux, est elle aussi uniquement réservée à la marche.

Le viaduc Salah-Bey est quant à lui le 8e et dernier pont construit à ce jour à Constantine. Commencé en 2010 et achevé en 2014, ce pont moderne à haubans relie le centre-ville au plateau de Mansourah. Long de plus d’un kilomètre, il est baptisé en hommage à Salah Bey, un des anciens dignitaires ottomans de la région.

Houari Ayadi

Producteur-réalisateur de la série documentaire Direction l’Algérie (AYADI Productions - A. Prods)

https://www.directionlalgerie.com/
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