Sidi El Houari, le Saint patron d’Oran
Dans l’imaginaire oranais, le personnage historique de Sidi El Houari n’est pas une figure lointaine, c’est une présence familière. Le cénotaphe de ce savant soufi demeure un lieu de recueillement actif, un repère où l’on vient implorer, demander et remercier.
Né au milieu du 14e siècle, Mohammed Ben-Omar El Houari est originaire de la tribu berbère des Houaras, d’où son nom, El Houari, “celui des Houaras”. On raconte qu’à l’âge de 10 ans, il connaît déjà le Coran par cœur. Après une vie d'errance et de solitude dans le désert, cet érudit soufi fait ses premières études à Béjaïa, dans un foyer intellectuel réputé. À 25 ans, il enseigne à Fès la jurisprudence et la langue arabe, puis se rend en pèlerinage à La Mecque et à Médine, visite Jérusalem et, à son retour, se fixe à Oran où il a le double rôle de prédicateur et d’éducateur religieux dans la plus vieille mosquée de la ville.
Réputé pour son érudition, on lui doit un ouvrage, Kitab Essehou oua Etenbih, “livre de l'oubli et de l'avertissement”, dédié aux jeunes écoliers.
Sidi El Houari serait décédé en 1439.
3 siècles plus tard, quand les Ottomans reprennent Oran aux Espagnols, le Bey décide de reconstruire son mausolée. Car l’homme de foi, entre temps devenu Saint patron de la ville, a donné son nom au quartier de Sidi El Houari, le plus ancien de la cité, mais aussi l’un des plus vieux du bassin méditerranéen. Il constitue historiquement le premier centre-ville d’Oran, sa vieille ville anciennement appelée Casbah.
Depuis “9 générations”
Durant le tournage du premier épisode de la série documentaire Direction l’Algérie, nous avons pu échanger avec deux descendants de Sidi El Houari : Nourine Benmaamar et Houaria Bensetti. Ensemble, nous sommes notamment revenus sur l'histoire de leur ancêtre et son importance symbolique et spirituelle pour les Oranaises et Oranais aujourd’hui.
“Sidi El Houari est devenu Saint patron de la ville d’Oran au 15e siècle, il y a très longtemps”, raconte Houaria Bensetti. “Nous vivons à Sidi El Houari, depuis la libération d’Oran par le bey Mohamed el Kebir de l’occupation espagnole. Ça fait quand même 9 générations que nos familles vivent ou ont vécu à Sidi El Houari”, ajoute la professeure-formatrice d’enseignants de français à Oran.
“Sidi El Houari est venu à Oran dans un contexte assez particulier : l’ère des croisades, des guerres de religion entre le Sud musulman et le Nord chrétien, pendant le royaume des Zianides qui étaient à leur apogée. Sidi El Houari a eu un rôle religieux, mais il a eu aussi un très grand rôle politique. C’est un peu grâce à ce personnage qu’Oran est devenue une cité vénérée. Il a donné ses lettres de noblesse à la ville“, ajoute quant à lui le professeur Nourine Benmaamar.
Un mausolée très fréquenté
Vénéré à Oran, le cénotaphe de Sidi El Houari est très fréquenté par les habitants de la ville qui viennent y faire une ziara, une sorte de pèlerinage.
“Ils viennent rendre visite au Saint patron de la ville d’Oran, ils viennent se recueillir auprès de sa tombe, allumer une bougie, de l’encens. C’est un passage obligé. Venir à Oran et ne pas rendre visite à Sidi El Houari, c’est vraiment une calamité”, lance Houaria Bensetti.
Grâce à leur métier d’enseignants, Houaria et Nourine continuent de transmettre l’histoire du mausolée de leur ancêtre et de son quartier aux nouvelles générations. “On ne peut pas dissocier El Houari Ben-Omar de la ville d’Oran. C’est impossible. À travers Sidi El Houari, on transmet toute la mémoire d’une ville“.
Le mystère de sa tombe
Comme pour bon nombre de personnages historiques, plusieurs lieux se disputent la naissance ou revendiquent d'avoir recueilli la dépouille mortelle de Sidi El Houari. Pour certains, l’érudit soufi serait décédé à Oran et aurait été enterré dans le quartier qui porte aujourd'hui son nom.
Pour d’autres, Sidi El Houari se serait déplacé vers le Sud Algérien où il se serait installé dans un village appelé Aglad, non loin de Timimoun, et où il passa le reste de sa vie jusqu'à sa mort en 1439. C’est là où il aurait été enterré.
Pour les Bensetti-El-Houari, ses descendants directs, son corps reposerait à Hassi El Ghella, dans la région de Aïn Témouchent, près de son ami le marabout Sidi Saïd.